Histoire - France
Méssaouda, c’est une arrière-grand-mère juive arabe qui vient de mourir. De son histoire, de son humour et, surtout, de sa langue, Yossef Murciano, son arrière-petit-fils, garde avant tout le souvenir d’une incompréhension. Dans ce texte, le descendant lointain évoque, à l’heure des adieux, son rapport d’étrange familiarité avec la culture juive marocaine, dans laquelle il a baigné toute sa vie, sans pourtant jamais véritablement la connaître.
En février, nous publiions un texte de Gabriel Abensour déplorant la tiédeur du franco-judaïsme et son désarroi dû à l’oubli de ses héritages spirituels, notamment sépharades. David Haziza lui répond ici, sous la forme d’une « critique modérée et amicale ». S’il s’accorde avec le constat fait par Abensour d’une perte des forces vives du judaïsme, il ne l’explique pas par un dédain colonial pour la sépharadité, mais plutôt par une tentative de rendre le judaïsme moderne et présentable.
Georges Clemenceau occupe une place d’honneur dans l’étroit panthéon des combattants français de l’antisémitisme au tournant du XXe siècle. Ardent dreyfusard, ami du sulfureux Cornelius Herz, patron politique de Georges Mandel, il fut plus d’une fois attaqué par les antisémites comme l’obligé du « syndicat juif ». Pourtant, c’est le même Clemenceau qui, quelques mois plus tôt, au plus fort de l’Affaire Dreyfus, faisait paraître six petits textes, entre nouvelles, contes et récits de voyage, en un petit volume titré Au pied du Sinaï (1898) que republient aujourd’hui les Éditions de L’Antilope. Que beaucoup des préjugés antisémites de l’époque se retrouvent dans ce volume interroge le lecteur d’aujourd’hui. Philippe Zard revient sur cet imaginaire dérangeant et évoque, avec raison, « un temps où la ligne de partage entre l’antisémitisme et ses adversaires n’exclut pas un riche répertoire de représentations partagées ».
Les éditions de l’Antilope publient demain le premier livre de Joseph Voignac. Ce jeune historien a enquêté sur une institution atypique : l’école Maïmonide, le premier établissement secondaire juif de France. De sa fondation dans l’entre-deux-guerres jusqu’au début du XXIe, l’auteur dresse le portrait de cette grande institution « juive et républicaine ». Mais à travers l’histoire de cette école, c’est aussi le destin des Juifs en France depuis un siècle qui s’expose : du « réveil juif » de l’entre-deux-guerres, à l’épreuve de la Shoah, de l’accueil des populations juives originaires d’Afrique du Nord à la guerre des Six jours, du renouveau de l’antisémitisme depuis trente ans en passant par l’attraction du sionisme puis de l’État d’Israël. K. propose en exclusivité quelques extraits de ce livre passionnant.
Le terme d’israélite est récemment revenu dans l’actualité à la suite de sa valorisation par un polémiste, désormais candidat à l’élection présidentielle française. Pourtant le modèle israélite que ce dernier prétend incarner n’a rien à voir avec la réalité de ce que fut l’israélitisme. À travers un vibrant hommage à Marcel Wormser, récemment disparu, et à son père, Georges Wormser, Milo Lévy-Bruhl restitue les coordonnées principales de l’israélitisme et revient sur les raisons de sa disparition.
Il y a quarante ans parut, en français et anglais simultanément, le grand livre d’histoire Vichy et les Juifs, de Michael R. Marrus et Robert O. Paxton. Réédité en 2015, le livre connaît aujourd’hui un regain d’intérêt, alors que certaines déclarations remettent en cause la responsabilité de la France dans la politique persécutrice à l’égard des Juifs sous l’occupation allemande. En 2015, à l’occasion d’une journée en hommage pour celui qui fut à l’origine de son écriture, Roger Errera, Robert O. Paxton, qui nous autorise aujourd’hui à reproduire ce texte, est revenu sur le difficile processus de production de ce livre qui a si violemment mis à mal le mythe de la France résistante.
Le 19 octobre dernier a été vendu, à New York, l’un des plus vieux manuscrits hébraïques médiévaux conservés en France. Un riche collectionneur, privé et anonyme, l’a acquis pour plus de huit millions d’euros. Le Mahzor dit « Luzzatto » était un des joyaux, depuis 1870, de la Bibliothèque de l’Alliance Israélite Universelle. Noëmie Duhaut revient sur ces événements et pose la question que ceux-ci suscitent : Pourquoi des archives concernant la vie, la culture et la politique juives, ainsi que les recherches sur ces sujets, peinent-elles à exister en France ?
À travers la promesse de liberté et d’égalité formulée pour chaque Juif par les révolutionnaires, c’est aussi une certaine modalité de l’existence politique moderne que la France a voulu défendre et incarner. Les épreuves qu’affrontent les Juifs français aujourd’hui rappellent donc la France à elle-même et interrogent chacun : souhaitons-nous persévérer dans la défense d’un idéal qui distingua la France parmi les nations ?
Surnommés les frères Je Sais Tout, Joseph, Salomon et Théodore Reinach représentent à la fois l’excellence académique et l’assimilation exacerbée des juifs français au tournant du XXème siècle. Le cadet Salomon notamment, à travers sa défense d’un franco-judaïsme libéral modernisé ou son opposition au sionisme, a incarné la pointe la plus assimilée de l’israélitisme…
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