Le discours prononcé à Munich par le vice-président américain J. D. Vance a rendu perceptible, au moins pour la frange de la conscience européenne qui a su rester lucide, une urgence : l’Europe, restée léthargique depuis des années maintenant et ceci malgré les menaces qui pointaient et que Vance a seulement eu le mérite douteux de prononcer à haute voix, doit se ressaisir. Se ressaisir toutefois – et pour importante que soit la réflexion sur une politique de défense européenne commune – ne saurait se limiter à une prise en compte de la realpolitik. Il faut sur ce point être sensible au diagnostic en forme de pied de nez que nous a adressé Vance, en déplorant le supposé divorce de l’Europe avec les valeurs démocratiques et de liberté d’expression si chères aux États-Unis, alors même que le régime trumpiste prend le chemin de l’autoritarisme ouvert et de la censure systématique. En l’absence d’une conception forte de l’Europe et de sa vocation politique, le risque est que le même chemin soit suivi, et qu’à la léthargie d’un libéralisme qui, depuis belle lurette, n’a plus réfléchi aux ressorts politiques de son existence, succède le cauchemar bien réel d’un souverainisme inféodé aux grandes puissances et jouant la « démocratie » contre le droit. À très court terme, celui des élections fédérales décisives qui auront lieu en Allemagne ce week-end, ce cauchemar a un nom : AfD. Nous publions en conséquence un texte de Monty Ott sur l’histoire de ce mouvement, et le cataclysme démocratique que représenterait la collaboration des partis conservateurs avec l’extrême droite…
Les élections fédérales allemandes - qui auront lieu ce dimanche 23 février 2025 – sont d’une importance décisive pour l’avenir de l’Europe. Dans cette perspective, Monty Ott livre pour K. une enquête sur l’histoire de l’AfD, en forte progression. Aujourd’hui soutenu par Trump et Musk, et se faisant le chantre des intérêts russes, ce parti a traversé depuis sa création il y a une dizaine d’années un processus de radicalisation le conduisant vers des positions de plus en plus anti-européennes et d’extrême droite. Plongée dans les réseaux et l’idéologie du souverainisme allemand.
Qu’est-il advenu d’Odessa, jadis surnommée « étoile de l’exil » par Isaac Babel, depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine ? Joseph Roche nous livre ici son témoignage sur la manière dont la communauté juive s’efforce d’y subsister, malgré la guerre et les départs.
Que signifie pour une nation d’exister ? À partir de la position de Milan Kundera et du mouvement de résistance culturelle contre la dissolution des "petites nations" dans le totalitarisme, Danny Trom interroge la différence qu’il y a entre les rêves nationalistes de puissance et l’irréductible revendication d’un esprit national (et européen). N’y-aurait-il pas là un enjeu pour l’avenir d’Israël ?
La trêve conclue entre Israël et le Hamas donne lieu à un spectacle déplorable. Côté Hamas, on crie « victoire » sur un champ de ruines et de cadavres, au mépris du sort de la population gazaouie pour laquelle le groupe n’a d’autre projet que celui du martyr. Côté israélien, Netanyahu se réjouit des parodies de « solution » annoncées avec une légèreté inouïe par le président Trump. K. se fait le relais d’une voix palestinienne, celle de Ihab Hassan, d’abord parue dans Liberties, qui pense dans les seuls termes praticables politiquement : ceux d’un conflit entre deux revendications nationales également justes, désignant l’horizon d’une solution à deux États.
Dans ce nouvel épisode des podcasts de la Revue K., Elie Petit reçoit Nathalie Azoulai pour une discussion autour de deux de ses romans, séparés de 20 ans : Les Manifestations (2005, Seuil) et Toutes les vies de Théo (qui vient de sortir aux éditions P.O.L.).
La pensée de Levinas procède avant tout d’un souci éthique, qui semble l’élancer vers des hauteurs étrangères à la mêlée politique. Pour autant, on trouve en certains points clés de son œuvre des considérations politiques audacieuses et en mesure d’éclairer notre action sur le présent. Jean-François Rey nous fait ici découvrir ce versant trop souvent survolé du philosophe.
Le travail de documentariste de Ruth Beckermann (née en 1952) – qui n’est encore pas assez connue en France – a joué un rôle important dans l’évolution du rapport de l’Autriche à son passé. Dans cette rencontre avec la cinéaste et écrivaine viennoise, Liam Hoare l’interroge sur quelques-uns des documentaires de sa riche filmographie et sur la manière dont ils articulent militantisme politique et judaïsme, dans le contexte d’une montée graduelle de l’extrême-droite et d’un tabou portant sur le sort des juifs pendant la guerre.
Au nom de quelle promesse, et de quelle loi, la conquête de la terre promise est-elle justifiée ? Ivan Segré propose ici une lecture du livre des Juges, dont la structure révèle selon lui la nécessité d’une mise à mort de la pulsion belliciste et phallique qui, hier comme aujourd’hui, aliène Israël de son fondement.
A l’occasion de la commémoration des 80 ans de la découverte du camp d’Auschwitz-Birkenau par l’armée rouge, nous publions un dossier rassemblant des textes parus dans K. traitant de l’histoire et des enjeux mémoriels entourant ce lieu qui symbolise, plus que tout autre, l’horreur de la Shoah. Vous pourrez y retrouver une réflexion de Bruno Quélennec sur l’antisémitisme « à cause d’Auschwitz », un manuscrit clandestin écrit par des prisonniers juifs du camp qui déjà s’inquiétaient de la manière dont serait déformée la représentation de la Shoah, et plusieurs textes s’affrontant justement à ces déformations et aux difficultés dans la constitution d’une mémoire du génocide.
Pourquoi certains historiens spécialistes de l’antisémitisme refusent-ils absolument toute analogie entre le 7 octobre et les persécutions antijuives historiques ? Matthew Bolton situe ici ce débat aux lourdes implications politiques sur un plan épistémologique, rendant compte des motifs pour lesquels les « historicistes » refusent de concevoir l’antisémitisme comme une « haine éternelle ». Mais il dégage en retour l’impensé de leur méthode, qui finit par dissoudre le concept même d’antisémitisme en faisant oublier sa nécessité historique.
Alors que sont commémorés les 80 ans de la découverte d’Auschwitz, et que les derniers survivants sont convoqués pour pallier aux insuffisances d’une mémoire qui semble ne jamais parvenir à s’inscrire, Ruben Honigmann réfléchit dans ce texte à la possibilité de raconter la Shoah. Dans ce texte personnel, cette tentative s’apparente à un arpentage sans fin et dont le sens n’est jamais assuré.
Alors que les bombardements s’arrêtent à Gaza et que les otages israéliens commencent à être libérés, Bruno Karsenti et Danny Trom interrogent les implications de cet accord de cessez-le-feu qui, s’il rend Israël au sens de sa mission historique, laisse latente la menace du Hamas et met en cause la forme prise par les opérations militaires menées depuis plus d’un an.
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