Politique

Depuis le 10 décembre, Javier Milei, « el loco » [le fou], est officiellement le nouveau président de l’Argentine. Parmi les éléments stupéfiants de la trajectoire du tribun populiste parvenu au pouvoir : sa relation avec le judaïsme. Il a fait du grand rabbin de la communauté juive marocaine-argentine Acilba son « guide spirituel », et déclaré qu’il consacrerait sa vie à la Torah une fois qu’il aurait accompli la mission politique que Dieu lui a assignée. Francesco Callegaro revient sur l’étrange nœud théologico-politique dans lequel le judaïsme orthodoxe et le sommet de l’État argentin se trouvent aujourd’hui imbriqués.

Ce texte a été rédigé dans un autre contexte que celui qui s’est formé après le 7 octobre. Il anticipait toutefois une double question que cet événement a précipitée : celle de la spécificité de l’antisémitisme à l’intérieur de la logique raciste, et celle de ce qui, dans les sociétés contemporaines, rend les victimes potentielles du racisme parfois porteuses, paradoxalement, d’arguments antisémites.

Comment le 7 octobre et ses conséquences sont-ils vécus par les Arabes israéliens ? Dans son témoignage, Mouna Maroun, docteure en neurobiologie et vice-présidente de l’Université de Haïfa, apporte des éléments de réponse à cette question. Elle interroge – à partir de son expérience personnelle d’une coexistence harmonieuse entre Juifs et Arabes israéliens, et de son combat pour l’approfondir à l’université – les difficultés que pose au processus d’intégration le choc vécu par la société israélienne dans son ensemble, mais aussi les raisons d’espérer.

En filmant eux-mêmes leurs crimes, les terroristes du Hamas ont assuré la mise en spectacle du massacre qu’ils ont commis le 7 octobre. Un film de plus de 40 minutes, documentant les atrocités, a été conçu par les autorités israéliennes et plusieurs fois projeté (depuis le 23 octobre en Israël, depuis le 14 novembre en France) devant un public choisi. Que contient exactement ce film — qui soulève la difficile question de savoir comment manier ces images ? Dans un débat réalisé en partenariat avec Akadem, Michael Prazan – documentariste et écrivain – et Jean-Baptiste Thoret – historien du cinéma – interrogent l’histoire, les usages, et les effets des images documentaires de violence extrême sur ceux qui les regardent.

Philip Spencer, auteur de nombreux textes sur l’antisémitisme moderne et la Shoah – et plus particulièrement sur les problématiques soulevées par leur traitement à gauche –participe aujourd’hui au nouveau London Centre for the Study of Contemporary Antisemitism, fondé par David Hirsh. Dans l’entretien qu’il accorde à la Revue K., où il évoque son propre itinéraire politique, il revient sur les réactions au 7 octobre en Angleterre, repassant par l’histoire de l’héritage non digéré du mandat anglais sur la Palestine comme par celle du Labour sous la direction de Jeremy Corbyn.

Deux mois après le 7 octobre, Bruno Karsenti s’attache à décrire le tournant que représente un tel événement, pour Israël comme pour la diaspora. Une coordonnée existentielle du monde juif a été touchée, et si la réaction a été immédiate et forte de la part du peuple israélien et de son État, ce qui s’est produit n’en emporte pas moins la nécessité de penser à nouveaux frais les contraintes et les devoirs qui pèsent sur le monde juif tout entier. Ce qui engage aussi, et sans doute avant tout, de considérer la question palestinienne autrement qu’on ne l’a fait jusqu’à présent.

Que dire des crimes sexuels perpétrés par les hommes du Hamas le 7 octobre – documentés un peu plus chaque jour par le travail d’un groupe israélien de gynécologues, médecins légistes, psychologues et juristes du droit international ? Et comment comprendre l’occultation de la violence faite aux femmes ce jour-là par une partie de l’opinion mondiale – supposées « féministes » comprises ?  Cette occultation ne revient-elle pas à faire une deuxième fois violence à ces femmes, comme si leur calvaire ne comptait pas et était dépourvu de signification ?

Après le massacre du 7 octobre, la gauche israélienne a vu comment, aux États-Unis et en Europe, une partie de la gauche globale avait refusé de se désoler de la mise à mort de 1200 hommes, femmes et enfants. Adam Raz – interviewé dans K. cette semaine – est l’un des auteurs de la lettre ouverte exprimant sa « [préoccupation devant] la réponse inadéquate de certains progressistes américains et européens concernant le ciblage des civils israéliens par le Hamas, une réponse qui reflète une tendance inquiétante dans la culture politique de la gauche globale. ». Julia Christ revient sur la désillusion vécue par la gauche israélienne et formule ce que nous enseigne politiquement le clivage qui s’est révélé entre celle-ci et une partie de la gauche globale.

Adam Raz est un historien israélien. Il a publié un grand nombre de livres et d’articles condamnant en particulier l’expulsion des Arabes pendant la guerre de 1948 et l’occupation après 1967. Militant de gauche, abasourdi par certaines réactions qui, après le 7 octobre,  se sont exprimées aux États-Unis et en Europe au sein de son camp politique, il l’est l’un des auteurs de la lettre ouverte : « Déclaration des progressistes et des militants de la paix basés en Israël. À propos des débats sur les événements récents dans notre région. » Rencontre.

Avec le soutien de :

Merci au bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll pour leur coopération dans la conception du site de la revue.

Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.