Politique
L’élection de Zohran Mamdani à la mairie de New York, qui en fait le premier maire ouvertement antisioniste de la métropole, dépasse de loin les frontières de la politique municipale. Ce succès, porté par une jeunesse progressiste et une partie significative des Juifs américains, révèle la profondeur des fractures générationnelles et idéologiques au sein du judaïsme américain. Entre désaffection croissante envers Israël, montée de l’antisémitisme et recomposition du Parti démocrate, la victoire de Mamdani agit comme un révélateur brutal d’un monde juif américain en plein trouble identitaire.
Trente après l’assassinat de Rabin, que reste-il du camp de la paix ? Ilan Greilsammer rappelle ici quels étaient les objectifs poursuivis par la politique de Rabin, et dresse le constat amer d’un devenir majoritaire du camp de la droite. L’incurie de ce dernier, révélée par le 7 octobre et la conduite de la guerre à Gaza, permettra-t-elle de rebattre les cartes ?
Il y a exactement trente ans, le 4 novembre 1995, Yitzhak Rabin était tué par un juif religieux extrémiste opposé au processus de paix. Dans Yitzhak Rabin, la paix assassinée ? (Editions Lattes), Denis Charbit revient sur l’onde de choc de l’événement, l’héritage ambigüe et la mémoire fracturée du Premier ministre israélien dans son pays. Car son nom divise encore, malgré les commémorations qui sont devenues « un temps où l’on ment, un jeu de rôles, où par respect des formes, les adversaires de Rabin qui sont au pouvoir depuis près de trente ans ont ‘le devoir moral de le commémorer et le devoir politique de l’oublier’ » écrit Charbit dont nous publions deux extraits de son livre à paraître cette semaine.
Sous le gouvernement Netanyahu, et avec la guerre à Gaza, l’État d’Israël s’est trouvé de plus en plus isolé sur la scène internationale. Le Premier ministre israélien, amateur de politiques de puissance et de bravades virilistes, voudrait en faire un motif de fierté : « Nous allons devenir une super-Sparte ». Mais, interroge Danny Trom, une souveraineté spartiate, n’est-ce pas une pseudo-souveraineté, en particulier pour le peuple juif ? Interrogeant les leçons politiques tirées par Hannah Arendt de l’histoire juive, le sociologue identifie alors les exigences qui s’imposent à l’État hébreu, s’il veut s’assurer d’une autonomie plus pérenne.
Entre partisans convaincus et détracteurs farouches, la reconnaissance de l’État de Palestine cristallise des positions tranchées. Les arguments de chacun sont d’ailleurs défendables — dès lors qu’ils visent à la fois la sécurité d’Israël et le droit des Palestiniens à l’autodétermination –, mais l’enjeu est ici de saisir ce que produit réellement un tel geste : une déclaration de principe porte-t-elle à conséquences pour l’avenir ?
Après l’affaire Brusselmans, le magazine flamand HUMO a encore frappé … Cette fois-ci, c’est le trope antisémite moyenâgeux du « boucher juif » qui se trouve réactivé par une caricature du duo Kama & Seele. Joël Kotek, historien et président de l’Institut Jonathas, revient ici sur l’histoire et l’actualité de l’imagerie antisémite dans la presse belge et internationale.
Si le messianisme représente sans doute la plus sérieuse menace interne pour l’avenir d’Israël, il se décline néanmoins au pluriel. Perle Nicolle-Hasid et Sylvaine Bulle l’appréhendent ici dans la diversité de ses courants, à partir d’une divergence fondamentale : la question du rapport au sionisme réalisé, c’est-à-dire à l’État. Mais qu’il s’agisse des réalistes cherchant à faire de l’État un outil du messianisme, ou des puristes s’en détachant pour vivre selon l’Israël ancestral, le présent de la rédemption écrase l’horizon du sionisme.
Parmi les feuilletons politiques de l’été, l’échange épistolaire entre Benjamin Netanyahou et Emmanuel Macron est venu rejouer la scène classique du dialogue de sourds. Au-delà des pantomimes, qui peut en effet dire ce qu’était l’objet de leur correspondance ? Gérard Bensussan s’attache ici à décrypter les motifs d’une incompréhension particulièrement symptomatique de la situation politique actuelle.
Comment expliquer l’acharnement d’Israël dans cette guerre à Gaza qui n’en finit pas ? Danny Trom se propose ici de l’analyser à partir d’un symptôme : la prolifération post-7 octobre des kinot, ces plaintes poétiques que l’on croyait propres à la tradition exilique. La lamentation israélienne se formule donc dans le langage de l’exil et de son impuissance alors même qu’elle accompagne aujourd’hui la guerre d’un État par lequel les juifs se sont dotés d’une puissance inédite – et donc d’une responsabilité nouvelle. Danny Trom nous invite à réfléchir sur la tension interne à ce paradoxe.
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La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.