#4 / Edito

Comme le dit Joann Sfar dans le long entretien qu’il nous a accordé pour ce 4éme numéro de K. – et notre premier podcast – la liste incalculables de toutes les haines, « le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie, la misogynie, égrènent des phénomènes qui ne se ressemblent pas, qui n’ont pas les mêmes moteurs. Il faut les nommer correctement ». Or, il semble que nommer soit devenu une opération problématique quand elle touche à certains mots. Avec la résurgence des actes antisémites violents, au tournant du vingt et unième siècle, la question des manières de les combattre s’est imposée dans le débat public ; et ce combat militant est aussi devenu un combat rhétorique ou linguistique. Comment le sens même du mot « antisémitisme » est-il devenu l’objet d’une incessante dispute ?

Depuis une dizaine d’année, différentes instances internationales, sous l’égide de l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance), ont travaillé à une « définition de travail de l’antisémitisme[1] » en faisant, pour la première un lien entre hostilité à l’égard des juifs et celle à l’égard de l’État d’Israël.  Et dès sa parution, le texte de l’IHRA a fait naître une polémique. À la fin du mois de mars, un collectif d’intellectuels, principalement Israéliens et Nord-Américains, a proposé une définition alternative sous le nom de « Déclaration de Jérusalem ». Leurs signataires reprochent à la « définition de travail » de l’IHRA de trop se concentrer sur l’antisémitisme associé à la critique d’Israël et non sur d’autres formes de préjugés. Ils sous-entendent par ailleurs qu’elle menace la liberté d’expression.

Au sein de la rédaction de K., nous avons été plusieurs à être sollicités pour signer la Déclaration de Jérusalem. Sans même nous concerter, nous n’avons pas voulu le faire. Notre réticence illustre-t-elle le ressenti singulier de Juifs européens, conscients de l’histoire du continent, et partageant une inquiétude sur l’avenir, difficilement perceptible aux USA ou en Israël ? C’est à cette question que sera en partie consacré notre #4 où, à côté de l’entretien mené avec Joann Sfar, nous interrogeons les critiques adressées à la définition de l’IHRA, celle de la Déclaration de Jérusalem, mais aussi celle des 122 intellectuels palestiniens et arabes publiée en novembre dernier simultanément en cinq langues.

Notes

1 https://www.holocaustremembrance.com/resources/working-definitions-charters/working-definition-antisemitism

A l’occasion de notre premier PodKast, rencontre avec Joann Sfar, qui nous devait bien quelques explications concernant le titre de son dernier roman : « Le dernier juif d’Europe ».

Où l’on se demande pourquoi la définition de l’antisémitisme proposée par l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance) suscite aujourd’hui autant de critiques et ce qui motive la « Déclaration de Jérusalem », publiée le 26 mars dernier…

Dans la « Déclaration sur l’antisémitisme de 122 intellectuels palestiniens et arabes », publiée en novembre dernier, figurent deux affirmations : l’antisémitisme doit être reconnu et combattu ; et la critique d’Israël n’est pas antisémite en soi. Deux affirmations déjà contenues dans la définition de l’IHRA. Cette Déclaration a pourtant été écrite contre cette dernière. Pourquoi ?

Avec le soutien de :

Merci au bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll pour leur coopération dans la conception du site de la revue.

Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.