Nous évoquions la semaine dernière le cas de la Hongrie, et d’un Viktor Orbán ami des juifs, du moins quand il parvient à les embarquer dans son projet politique réactionnaire. Mais au Brésil aussi, le très droitier Jair Bolsonaro a été, lors de sa présidence, un de ces soutiens indéfectibles à l’extrême droite israélienne, sans pour autant parvenir à s’attirer les faveurs des juifs brésiliens. C’est que la majorité de ces derniers (comme des hongrois du reste) soutient de longue date le camp progressiste. L’annonce de la victoire de Lula sonnait donc l’heure des réjouissances. Elles furent de courte durée. Car le nouveau président fait depuis preuve d’un antisionisme rabique, n’hésitant pas à comparer Israël à l’Allemagne nazie. Renan Antônio da Silva et Eric Heinze analysent pour nous les paradoxes auxquels doivent s’affronter les juifs brésiliens, coincés entre Charybde et Scylla.
Le miroir brésilien n’est pas le seul cette semaine à nous refléter cet écartèlement dans lequel les juifs semblent partout pris. C’est que, souligne Denis Charbit, « être israélien est une condition exaltante et déchirée ». À l’occasion de la sortie de son nouveau livre, Israël, l’impossible État normal (Calmann-Lévy), nous en publions les bonnes feuilles. Commencé à l’heure des manifestations contre la réforme constitutionnelle, achevé dans la tourmente de l’après 7 octobre, Charbit s’efforce d’y penser les fourvoiements qui ont mené Israël dans la crise actuelle, et d’y réfléchir son attachement intranquille au sionisme. Au milieu des dilemmes de l’époque, une certitude s’impose : « Un pays ne meurt jamais des exigences qu’on lui adresse ».
Déchirement, ambivalence, impasse, isolement… Depuis près d’un an, ces mots parsèment nos analyses, comme s’il était devenu impossible de penser la condition juive sans leur faire une place. Mais à quel vécu affectif font-ils référence ? Une fois n’est pas coutume, nous changeons de registre pour partager un podcast qui les donne à entendre. Binge Audio vient de mettre en ligne le premier épisode du documentaire audio de Juliette Livartowski, « Être juif en France après le 7 octobre », qui en comptera trois. Il nous importait de nous en faire l’écho, en l’agrémentant d’un texte introductif.