Histoire

Les propos de la ministre de l’égalité des chances du gouvernement Meloni remettant en cause les voyages scolaires à Auschwitz ont ravivé un débat ancien sur la mémoire de la Shoah dans l’espace public italien. Historienne de la diaspora juive, Serena Di Nepi raconte pourquoi elle n’a jamais participé à ces « Voyages de la Mémoire » pourtant devenus un rite civique central. Entre histoire familiale, transmission intime et cérémonial institutionnel, elle explore le décalage profond entre mémoire juive et mémoire nationale, et la manière dont le judaïsme continue de se dire en Italie hors des cadres commémoratifs officiels.

Pour l’historien Omer Bartov, la mémoire de la Shoah a éclipsé la Nakba et participe de la continuation de la catastrophe palestinienne : dans son dernier livre, il cherche alors à les replacer dans un même horizon historique et moral. Eva Illouz nous donne ici une lecture de cette entreprise qui interroge les œillères politiques de Bartov : jusqu’où comparaison est raison et ne dénature pas les objets qu’elle rapproche ?

« Trahison », c’est le mot approprié pour décrire ce que fait la coalition gouvernementale au pouvoir en Israël à l’esprit du sionisme. Alors que l’on espère que la fin de la guerre à Gaza sera l’occasion pour Israël de sortir de cette mauvaise pente, l’historien allemand du sionisme Michael Brenner rappelle ici ce qu’avaient en tête les pères fondateurs, toutes tendances politiques confondues, lorsqu’ils envisageaient la création d’un État juif démocratique.

En mars 1973, Robert Badinter prononce une plaidoirie — restée méconnue, mais capitale –lors du premier procès intenté en vertu de la loi Pleven, qui réprime l’incitation à la haine raciale. Face à un article de propagande soviétique où l’antisémitisme se déguise en antisionisme, l’avocat déploie une argumentation mêlant droit, histoire et mémoire juive.
À l’occasion de la panthéonisation de Robert Badinter, K. publie le texte intégral de cette plaidoirie, où s’illustrent son engagement contre l’antisémitisme et son attachement aux principes socialistes. L’ensemble est précédé d’une introduction de l’historien Emmanuel Debono et accompagné d’un appareil critique de notes.

À Treblinka, la mémoire devient enjeu d’État : monuments et projets muséaux redessinent le passé au mépris des sources, jusqu’à promettre un « mur des noms » que que nulle archive ne permet d’établir avec exactitude. Jan Grabowski et Katarzyna Grabowska plaident pour une politique mémorielle transparente et fondée sur la rigueur historique.

Dans Pogrom. Kichinev ou comment l’Histoire a basculé, paru en français aux Éditions Flammarion, Steven J. Zipperstein revient sur le massacre de Kichinev en 1903, événement local devenu traumatisme global dans la conscience juive moderne. Plus qu’un simple récit de violence, son enquête dévoile comment ce pogrom – largement médiatisé, interprété, mythifié – a infléchi l’histoire juive contemporaine : il a nourri l’essor du sionisme, suscité une mobilisation mondiale, inspiré la littérature et la presse, et forgé un paradigme durable de la vulnérabilité juive.

Pour mieux transmettre et faire circuler nos idées, K. repense et refonde son site internet, crée de nouveaux formats (Audio, Réseaux sociaux…) et commande de nouveaux textes.

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Pour garder présent à notre mémoire le grand historien Pierre Nora, qui vient de nous quitter lundi 2 juin, nous donnons à lire un texte qui interroge l’écho entre le projet des Lieux de mémoire de Nora et Zakhor de Yerushalmi. Deux rapports à la mémoire foncièrement distincts, voire opposés, qui pourtant dessinent tous deux la question de l’Émancipation des juifs dans la nation moderne, et de ce qui persiste de leur conscience historique lorsque la République ne tient pas ses promesses.

Comment un classique de la pensée juive écrit en arabe au XIIe siècle, qui revendique la supériorité absolue des Juifs et de l’hébreu, s’est-il retrouvé cité à la fois par l’extrême droite israélienne et par les franges les plus radicales de l’antisionisme ? Pour dissiper ce mystère, et les mauvaises lectures suscitées par ce texte, David Lemler s’est plongé dans le Kuzari de Yehuda Halevi. De son interprétation se dégage une utopie inattendue, celle de l’État juif des Khazars, dont la fonction critique pourrait aider à se dégager des apories contemporaines. 

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Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.

La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.