# 71 / Edito

 

Suite et fin cette semaine de notre long entretien avec Daniel Mendelsohn. Dans cette dernière partie, il porte un regard politique sur notre époque en évoquant les années Trump, la floraison contemporaine de dirigeants populistes, la montée de l’antisémitisme aux Etats-Unis et en Europe, Israël comme dernier refuge pour les Juifs et la guerre en Ukraine – pays qu’il connait bien pour l’avoir sillonné lorsqu’il écrivait Les Disparus. Son diagnostic est sombre, pessimiste : « La seule chose dont on soit sûr en ayant étudié l’histoire – et on le sait notamment en tant que spécialistes de l’Antiquité –, c’est que l’histoire se répète. Les gadgets s’améliorent, mais la nature humaine reste la même. Je le vois ici même dans mon propre pays. Les humains, fondamentalement, sont épouvantables. »

C’est d’un autre écrivain de langue anglaise qu’il est aussi question cette semaine dans K., et d’un de ses livres en particulier. Avec Daniel Deronda, la grande George Eliot, l’auteure de Middlemarch, écrit en 1876 un roman devenu un fleuron de la littérature britannique. Élevé dans un foyer aristocratique, Deronda aspire à découvrir ses origines. Qui sont ses véritables parents ? Une rencontre fortuite l’entraîne dans le Londres de Whitechapel et le monde des Juifs britanniques… Josh Glancy revient sur le sens et la portée de ce roman unique. Dans Daniel Deronda, il voit le reflet le plus empathique de l’intégration des Juifs en Angleterre dans la littérature victorienne et des sentiments pro-sionistes détonants.

Enfin, nous republions aussi un reportage d’Élie Petit : une histoire rocambolesque de nourriture casher devenue difficile à faire acheminer en Irlande du Nord après le Brexit et qui donne l’occasion de découvrir la centaine de Juifs qui vit encore à Belfast aujourd’hui. En échangeant avec les derniers animateurs de cette minuscule communauté, Élie Petit nous raconte à la fois les contraintes kafkaïennes et les solutions instables qu’ils imaginent chaque jour pour acheminer une nourriture casher jusqu’à Belfast. Mais, ce qu’il dévoile surtout, ce sont les adaptations successives que bricole depuis plus de trente ans une communauté naguère prospère et qui n’en finit plus d’être la victime collatérale des déchirements et des dissensus britanniques. Dernières traces d’une vie juive avant disparition ?

L’intime, chez Daniel Mendelsohn, est sans cesse percuté par les soubresauts d’une histoire violente et tragique. Quel regard, dès lors, porte-t-il sur l’époque inquiétante que nous vivons ? Des années Trump à la guerre en Ukraine, en passant par Israël, c’est le regard politique de l’écrivain que nous avons voulu interroger, pour terminer notre entretien.

Publié en 1876, Daniel Deronda est un roman unique dans l’histoire de la littérature anglaise du XIXe siècle. Élevé dans un foyer aristocratique, Deronda aspire à découvrir ses véritables origines. Qui sont ses vrais parents ? Une rencontre fortuite l’entraîne dans le Londres de Whitechapel et le monde des Juifs britanniques. Une affinité croissante le lie à ce monde, avant de découvrir finalement l’histoire de sa propre naissance. Situé au zénith de l’Angleterre victorienne, le dernier roman de George Eliot témoigne d’une profonde empathie envers les Juifs britanniques, tout en exposant les sympathies pro-sionistes de l’auteur. Comment a-t-elle réussi ce singulier exploit ? Et pourquoi ?

Victime collatérale du Brexit, la communauté juive d’Irlande du Nord, fondée en 1870, pourrait ne pas passer le siècle et demi d’âge. En effet, l’accord du Brexit et son protocole nord-irlandais, combinés aux accords de paix de 1998 conclus à la fin des “Troubles” (connus sous le nom de Good Friday Agreement), ont créé une nouvelle frontière douanière, sur la mer. Une frontière qui menace l’approvisionnement en nourriture casher de la centaine de Juifs vivant encore dans la région de Belfast. Comment une petite communauté vieillissante s’est évertuée, dans une situation rocambolesque, à trouver une solution ?

Avec le soutien de :

Merci au bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll pour leur coopération dans la conception du site de la revue.

Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.