L’intégration progressive des Juifs en Europe s’est toujours jouée dans une tension, entre ouverture et rejet. Cette tension est au cœur du nouvel essai de Bruno Karsenti, Les paradoxes de l’intégration (Calmann-Lévy, 2025), qu’il a présenté au Musée d’art et d’histoire du Judaïsme lors d’une rencontre avec Ruben Honigmann organisée en partenariat avec la Revue K. et Akadem.
Que signifie « s’intégrer » en Europe quand on est juif ? Pour Bruno Karsenti, ce n’est pas une assimilation complète, mais un paradoxe permanent : inclusion et citoyenneté d’un côté, maintien d’une différence irréductible de l’autre. Les paradoxes de l’intégration. L’Europe et les Juifs (Calmann-Lévy, 2025), essai qui retrace plusieurs siècles de rapports entre Juifs et nations européennes, explore la dynamique de ce mouvement contradictoire.
Interviewé par Ruben Honigmann, son auteur a parcouru les grandes étapes de cette histoire : l’expulsion d’Espagne en 1492, l’émancipation révolutionnaire, les débats allemands du XIXᵉ siècle, l’anéantissement pendant la Shoah des communautés d’Europe…
L’histoire du sionisme occupe une place centrale dans cette réflexion. Depuis 1948, l’existence d’un État juif reconfigure le rapport entre les diasporas et leurs pays d’appartenance. Elle oblige à penser les allers-retours entre citoyenneté nationale, horizon européen et lien transnational à Israël. Pourquoi les États modernes et l’Union européenne, qui se veulent universalistes, ne parviennent jamais à effacer totalement les réflexes d’exclusion et de stigmatisation ? A un moment où, après le 7 octobre, l’antisémitisme ressurgit — et où les fractures politiques s’accentuent autour de la « question juive » se redéployant en « question sioniste » –, cette analyse prend une résonance singulière.
Organisée en partenariat avec la revue K, la rencontre dépasse le simple retour sur l’histoire et propose une lecture du destin des Juif en Europe, mais aussi de toutes ses minorités, comme une clé pour comprendre nos propres impasses politiques.
La rédaction