Israël sur le Danube. Épisode 2

Aux yeux des dirigeants sionistes un tiens vaut mieux que deux tu l’auras

 

David Ben Gourion

 

Où l’on voit comment, en l’espace de quelques mois, deux millions de Juifs venus d’Europe et de Palestine se sont installés à Vienne.

 

Le 11 mai 1945, deux diplomates se rendent à Tel-Aviv pour rencontrer David Ben Gourion, Chaim Weizmann, ainsi que Nahum Goldmann et les dirigeants du Congrès juif mondial. Le premier émissaire représente le président Truman, le second le camarade Staline. Les puissances ont délibérément écarté l’Angleterre de ces tractations en raison du contentieux entre le Congrès juif et les autorités mandataires. On ignore si Truman et Staline se sont concertés sur ce point, mais l’émissaire de l’URSS, Iouri Lossowski, est juif, tout comme le délégué spécial des États-Unis : un jeune sergent du renseignement militaire, fraîchement naturalisé américain, Henry Kissinger. Né en Allemagne, émigré aux États-Unis, Kissinger a fort opportunément interrompu ses études de comptable pour s’engager dans l’armée. Combattant en Europe, il a rapidement acquis la confiance de ses chefs et le général Eisenhower entend mettre à profit sa connaissance de l’allemand et son flair politique pour dénazifier les zones occupées. Entre autres qualités, en effet, l’intéressé n’a pas son pareil pour distinguer l’irréductible hitlérien de l’assassin raisonnable dont les convictions nationales-socialistes ne sauraient résister à une bonne poignée de dollars. Le représentant de Staline quant à lui est un vieil apparatchik. Émigré en 1905 à Paris où il dirige bientôt la section des ouvriers casquettiers au sein de la CGT, Lossowski a connu Lénine et Trotski. Rentré en Russie en 1918, il deviendra président de l’Internationale syndicale rouge. Ayant miraculeusement échappé à toutes les purges, il se voit confier par Staline, en 1941, la présidence du Comité antifasciste des Juifs de l’URSS. Cette fonction lui confère un certain prestige auprès des Juifs des États-Unis et d’Europe. Pendant la guerre, le Comité alerte sur l’extermination des Juifs d’Europe et sera invité aux États-Unis par les organisations juives américaines soucieuses de lever des fonds pour soutenir l’effort de guerre de l’URSS.

Dans le cadre de sa mission en Palestine, Lossowski noue des liens avec le Joint Committee ainsi qu’avec les dirigeants de la gauche sioniste. Il fait la tournée des kibboutzim et des ateliers coopératifs. Il rencontre également les responsables du Hashomer, de la Histadrout, du Mapam et du Parti communiste et parvient à obtenir le ralliement de la gauche au projet de transfert. De son côté, Kissinger travaille au corps les sionistes généraux et les religieux modérés, avec des arguments aussi pragmatiques qu’efficaces, dont l’annonce de la création immédiate d’une filiale de la banque Goldmann Sachs dans le nouvel État juif et la reconstruction à l’identique de la synagogue de la Tempelgasse partie en fumées lors de la nuit de Cristal. Cependant, il ne néglige pas pour autant les sionistes de gauche, en dépit de leur collectivisme qui laisse craindre l’instauration du communisme. Au fil de ses rencontres, il esquisse une doctrine audacieuse qui va lui permettre, un quart de siècle plus tard, de changer la face du monde en organisant la rencontre entre Mao Zedong et Richard Nixon. En effet, pour isoler les communistes soviétiques, la méthode Kissinger prévoit déjà de s’appuyer sur d’autres communistes, fussent-il en apparence plus rigoureux sur la doctrine que les Russes. Il visite ainsi les kibboutzim les plus radicaux, ceux dont le collectivisme fait passer les kolkhozes pour des bastions de l’individualisme bourgeois. Lossowski pour sa part est accueilli avec méfiance et s’en étonne. Beaucoup de kibboutznikim parlent le russe, venant d’Ukraine et de Crimée et, à l’instar de leur maître à penser Haïm Arlozorov, ont étudié le communisme agraire du prince anarchiste Piotr Kropotkine. D’aucuns ont fait partie des escadrons juifs de l’armée insurrectionnelle de Nestor Makhno et craignent un piège bolchévique semblable à celui qui a permis à Trotski de liquider les anarchistes. Certains même ne sont pas loin de penser que le mystérieux assassinat de Haïm Arlozorov en 1933, sur la plage de Tel-Aviv, pourrait fort bien être l’œuvre du NKVD. À cette époque, les sionistes socialistes exercent toujours une certaine influence sur les Juifs d’URSS que la terreur stalinienne n’est pas encore parvenue à réduire au silence. De leur côté, les anciens du Bund n’ont pas oublié leurs camarades fusillés par les bolchéviques pendant la guerre civile russe ni l’exécution, en février 1943, des représentants du Bund de Pologne, Erlich et Alter, alors réfugiés en URSS. Ils ont donc toutes les raisons de se méfier de la promesse soviétique d’un État juif au cœur de l’Europe.

Lossowski est copieusement chahuté lors de plusieurs assemblées générales houleuses tenues dans des kibboutzim du Hashomer Hatzaïr.

Le lieutenant Henry Kissinger n’est pas mécontent d’apprendre que son homologue s’est fait chahuter. Il rencontre à son tour les kibboutznikim et leur jure ses grands dieux que jamais les États-Unis ne s’ingéreront dans la gestion de leurs entreprises collectivistes. Pragmatique, il leur fait savoir que la législation américaine permet de défiscaliser les dons aux œuvres humanitaires et pourrait s’appliquer aux crèches, aux écoles et aux dispensaires des kibboutzim après leur transfert en Autriche. Cette tactique s’avère en définitive beaucoup plus efficace que les débats idéologiques fumeux lancés par Lossowski.

À Tel-Aviv, Lossowski est accueilli très fraîchement au siège de la Histadrout, en raison de son passé à la tête de l’Internationale syndicale rouge qui n’a eu de cesse de provoquer des scissions au sein des organisations ouvrières. Kissinger, en revanche, est d’autant mieux accueilli qu’il est porteur d’un message de l’AFL-CIO annonçant la création d’un fonds de soutien aux syndicats réformistes d’Europe. Ledit fonds, destiné à empêcher la mainmise des communistes sur les syndicats ouvriers, permettra de subventionner grassement la Histadrout dans le but de faciliter son implantation en Autriche.

D’abord réticente, l’Agence juive — en sa qualité d’organe exécutif dirigeant du Yichouv — finit par se réunir à la mairie de Tel-Aviv et approuve à la majorité la proposition de Truman et Staline. Les quelque 600 000 Juifs peuplant alors le Foyer national juif manquent de tout. Ils vivent dans la crainte des attaques arabes. Et les Anglais empêchent les réfugiés en provenance d’Europe de rejoindre la Terre promise. La perfide Albion ne voit en revanche aucun inconvénient à laisser les rescapés des camps et des ghettos s’installer sur les rives du Danube autrichien. Les sionistes ne peuvent pas se montrer insensibles à la situation des Juifs qui errent à travers l’Europe. Chaim Weizmann plaide pour l’unité du peuple d’Israël considérée comme plus importante encore que la localisation du futur État juif. Ben Gourion envoie donc aussitôt sur place une mission dirigée par Abba Eban et Golda Meïr. Le jeune commandant Haïm Bar Lev, natif de Vienne, est chargé quant à lui de mettre en place un appareil de sécurité voué à remplacer le plus rapidement possible les forces soviétiques et américaines qui maintiennent l’ordre dans l’ancienne capitale impériale.

On parvient sans grand mal à trouver des rabbins pour balayer, à grand renfort de citations talmudiques, les objections des traditionalistes attachés à la terre ancestrale. Max Brod se charge de convaincre les intellectuels de Tel-Aviv réunis pour la circonstance dans la salle du théâtre Habima. Retrouver Vienne, comme à l’époque où il arpentait le Graben en compagnie de Franz Kafka, son compagnon de virée, c’est inespéré ! Surtout si les dirigeants de l’Agence juive s’engagent à placer la reconstruction du Burgtheater et de l’Opéra au rang des priorités, en plus de la réouverture des cafés.

Une flotte impressionnante de bateaux sature bientôt le port de Haïfa, formant un véritable pont jusqu’à l’estuaire du Danube. Étrangement, ce nouvel Exode possède la majesté de la sortie d’Égypte, alors même que le peuple d’Israël quitte définitivement le pays de Canaan. Mais les hectares de bonne terre d’Autriche semblent plus prometteurs que les étendues désertiques et les assemblées générales des kibboutzim se sont prononcées en faveur du transfert. Cette fois, nul n’oserait contester la légitimité des fermes collectives juives dans ces campagnes où les grands propriétaires comme les petits paysans ont massivement adhéré au nazisme.

En outre, les États-Unis ouvrent un crédit illimité pour la reconstruction du pays et l’accueil des rescapés. Staline, de son côté, s’engage à faciliter les déplacements des Juifs vers l’Autriche, en particulier ceux des anciens sujets de l’Empire austro-hongrois à savoir les Juifs originaires de Galicie, Hongrie et Tchécoslovaquie.

L’exode des Autrichiens vers la Bavière, le Tyrol et la Carinthie ne soulève guère d’émotion. C’est tout juste si l’on évoque la brutalité des expulsions dans la zone d’occupation soviétique. Mais la Croix-Rouge déploie une énergie considérable dans des régions où elle a longtemps brillé par son inertie et, en quelques mois, le Tyrol et la Carinthie voient fleurir des camps de réfugiés où les conditions sanitaires semblent satisfaisantes. L’annonce de la création à Innsbruck du Front Autonome du Tyrol Autrichien (FATA) suscite la réprobation de toute la presse occidentale. Les dirigeants de cette organisation — qui promet de reconquérir le territoire occupé par l’entité sioniste — sont bien évidemment d’anciens nazis, en dépit de leurs dénégations. L’un des chefs du FATA, Kurt Waldheim, vient tout juste de quitter l’uniforme d’officier de la Waffen SS dans lequel il a perpétré des massacres en Yougoslavie. Capturé par les partisans, il a été libéré sur ordre de Tito. En échange, Waldheim a formé une organisation paramilitaire, basée à Klagenfurt, et aidé son ancien ennemi à conquérir la Carinthie.

Aux États-Unis, le président Truman est rapidement confronté à une violente campagne antisémite. Le mouvement vers l’État juif d’Autriche menace de provoquer une fuite des cerveaux, des talents et des capitaux. Le fait est que les Rothschild n’ont pas attendu bien longtemps pour récupérer leurs anciens bureaux de Vienne, suivis par nombre d’établissements financiers de Wall Street. Les universités américaines et les centres de recherche scientifique se vident, en même temps que les grands studios d’Hollywood, les orchestres philharmoniques de New York et de Boston, les théâtres de Broadway et les Delicatessen du Lower East Side. Le distingué sénateur du Wisconsin, farouche pourfendeur des rouges et accessoirement alcoolique et morphinomane, obtient la création d’une commission d’enquête portant sur les liens du docteur Oppenheimer avec le nouvel État. Selon McCarthy, en effet, l’influence des idées communistes étant prépondérante dans l’État juif, le seul fait de permettre aux savants américains juifs de s’y installer revient à offrir à Staline la bombe atomique sur un plateau. À Washington, la Ligue antidiffamation (ADL) se plaint auprès de Truman des propos outrageants tenus par le même McCarthy à ce sujet : « Ces salopards de Rouskis nous ont déjà piqué assez de savants nazis ! On ne va quand même pas leur laisser les youpins en prime ! »

Pourtant Staline est opposé à la présence de savants atomistes dans le Judenstaat. En tout état de cause, Oppenheimer a fait savoir qu’il n’envisage pas de s’installer à Vienne et se considère comme un citoyen des États-Unis. Cette position satisfaisait tout à la fois Washington et Moscou.

Le Congrès des États-Unis adopte cependant une loi restreignant l’émigration juive vers l’Europe.

Toujours est-il qu’en l’espace de quelques mois, deux millions de Juifs venus d’Europe et de Palestine se sont installés à Vienne.

Certes, de nombreux incidents émaillent l’entreprise en Palestine où l’Irgoun tente de s’opposer au transfert en sabotant un bateau à Haïfa, en assassinant le commissaire des Nations Unies et en faisant sauter l’hôtel King David de Jérusalem. Le rembarquement des 600 000 membres du Yichouv a même donné lieu à de rudes combats opposant l’Irgoun à la Haganah. Le Palmach, unité de choc de la Haganah, a dû ouvrir le feu à plusieurs reprises sur le port de Haïfa. Au large de Tel-Aviv, des combattants de l’Irgoun se préparent à débarquer de l’Altalena pour empêcher l’évacuation de la ville. Le Palmach n’hésite pas à couler ce navire battant pavillon panaméen, tandis que la Haganah encadre le départ de la population juive.

Après le coulage de l’Altalena, les dirigeants sionistes socialistes proposent, dans un premier temps, un cessez-le-feu aux émules du défunt Zeev Jabotinsky. Ils entreprennent ensuite de les retourner avec l’aide des services alliés. Itzhak Shamir, que les Anglais ont expulsé de Palestine et qui croupit à Madagascar, se voit proposer de prendre la tête d’un commando chargé de terroriser les paysans autrichiens tentant de résister aux expulsions. Madagascar étant un territoire français, l’exfiltration de Shamir est rapidement organisée avec la complicité de Jules Moch, ministre de l’Intérieur. Les Britanniques vont jusqu’à libérer les membres du groupe Stern détenus dans la forteresse de Saint-Jean d’Acre. Shamir est parachuté à Linz par un avion français et ses hommes parviennent à le rejoindre à bord d’un Dakota de l’U.S. Air Force. Le commando récupère un stock d’armes et d’explosifs abandonné par la Wehrmacht et bizarrement « oublié » par l’Armée rouge, puis procède illico au nettoyage des quelques rares villages épargnés par les Soviétiques.

Menahem Begin, commandant de l’Irgoun Tzvaï Léoumi, vit à l’époque dans la clandestinité ; il reçoit la visite du fils de son héros, Ari Jabotinsky, qui avait suivi son père en exil aux États-Unis. Ari lui rappelle que son géniteur était davantage attaché à l’affirmation nationale du peuple juif qu’à la localisation de son État. Le rabbin Wiener achève de convaincre Menahem Begin en lui démontrant que le retour à Sion ne saurait être une entreprise humaine et que le peuple juif court au-devant d’un grave péril en persistant dans cette voie impie. En revanche, dans l’attente des temps messianiques, la Torah n’interdit nullement de regrouper les Juifs sur une autre terre.

Le commandant de l’Irgoun accepte de négocier avec David Ben Gourion qui lui accorde d’importantes concessions. Le leader socialiste s’engage notamment à donner le nom de Zeev Jabotinsky à une artère de Vienne. Il offre aussi à Begin de participer au gouvernement, ce que le chef des sionistes révisionnistes refuse, préférant fonder un parti d’opposition légal, le Hérout. Les services américains font transférer des fonds importants sur un compte ouvert au nom de cette formation politique auprès de l’agence viennoise de la Goldmann-Sachs. Menahem Begin embarque à Haïfa avec une centaine de ses partisans et leurs familles. Ben Gourion lui fait attribuer un hôtel particulier dans l’ancien quartier des aristocrates, miraculeusement épargné par les bombardements de la guerre, près de Schönbrunn.

Les opérations de rembarquement se terminent juste à temps pour éviter aux Juifs d’être pris en otage dans la guerre opposant les pays arabes au sujet du partage de la Palestine.

Une fois les Juifs partis, les troupes britanniques rembarquent à leur tour dans le cadre d’une opération qui se terminera, comme prévu, à la date d’expiration du mandat, soit le 14 mai 1948.

La Jordanie et la Syrie entrent aussitôt en conflit pour le contrôle des sources du Jourdain, du lac de Tibériade et de Jérusalem. De son côté, le roi Farouk déploie son armée le long de la côte méditerranéenne jusqu’à Jaffa, ainsi que dans le Néguev. La marine égyptienne s’empare du port d’Elath, obligeant la Jordanie à partager le golfe d’Akaba. La navigation en mer Rouge passe sous le contrôle de l’Égypte, mais Farouk n’est pas en mesure de s’assurer la maîtrise des eaux de la Méditerranée orientale jalousement gardées par les navires de sa gracieuse majesté qui patrouillent entre Alexandrie et Haïfa. Le roi Abdallah de Jordanie, appuyé par les troupes iraquiennes, lance une offensive en franchissant le Jourdain par le pont Allenby. Son but est de marcher sur Césarée et Saint-Jean d’Acre. Il entend bien récupérer Haïfa qui se trouve toujours sous l’autorité de la couronne britannique. Par ailleurs, les Français ayant retiré leurs troupes du Levant le 17 avril 1946, le Liban lève une armée, essentiellement composée de maronites et de druzes et lance une attaque dans le nord de la Galilée pour stopper l’avance de la Légion arabe transjordanienne.

En dépit des trois accords de cessez-le-feu intervenus en deux ans, tous les observateurs estiment qu’une guerre de longue durée a commencé avec la fin du mandat britannique. Les premières victimes de ces combats sont les paysans arabes de Palestine soumis aux pillages et aux exactions des quatre armées belligérantes. Sans parler des massacres perpétrés dans des villages de diverses confessions soupçonnés à tort ou à raison de soutenir l’adversaire.

Beaucoup doivent quitter leurs maisons et leurs champs et s’entasser dans des camps de réfugiés construits à la hâte sous l’autorité des Nations Unies. La guerre civile gagne Jérusalem où se font face musulmans et chrétiens, ces derniers étant eux-mêmes divisés entre catholiques romains, grecs orthodoxes, coptes, arméniens, maronites, protestants et éthiopiens.

Le Mufti de Jérusalem déclare que les Juifs ont jeté un sort sur les Arabes qui ne peuvent s’unir que contre eux et se déchirent en raison de leur départ.

Dans chacun des pays arabes, la situation des Juifs, rendus responsables de la guerre, s’est sensiblement dégradée. Des émeutes antijuives éclatent à Bagdad, Damas et Alexandrie. Le Mufti de Jérusalem, de son côté, appelle au massacre des Juifs qui entendent rester. Les protestations des intéressés qui font valoir à juste titre que leurs familles se sont installées dans le pays bien avant la naissance du mouvement sioniste ne sont d’aucun effet. Ce climat de violence provoque un exode des Juifs orientaux qui, ne pouvant demeurer en Iraq, en Syrie, au Yémen ou même en Égypte, demandent à rejoindre l’État juif. L’Agence juive est contrainte d’élaborer à la hâte un programme de relogement, principalement à Graz et à Linz où l’État entend développer l’activité industrielle. Les fonds versés par les Américains — et ceux collectés dans toutes les communautés juives du monde par le KKL — ayant essentiellement été affectés à la reconstruction de Vienne et aux kibboutzim, les Juifs orientaux installés à Linz, Graz et dans les autres villes en développement passent vite pour les parents pauvres du nouvel État.

Si l’on en croit les milieux nationalistes juifs proches de l’Irgoun, les Britanniques — fidèles en cela à leur détestable habitude de diviser pour mieux régner — auraient délibérément attisé les haines et les rivalités qui opposent les chefs arabes, de manière à accélérer le départ des Juifs de Palestine et du Moyen-Orient.

Tel n’est pas l’avis du Congrès juif mondial qui soutient mordicus que la majorité des pionniers choisissent de leur plein gré l’Autriche et partent avec enthousiasme vers Vienne qu’ils ont tant aimée au temps béni de l’empire et du kaiser François Joseph. Pourtant, force est d’admettre que cet enthousiasme ne se lit pas toujours sur les visages des Juifs orientaux surnommés « les Schwarz », parce que le Conseil provisoire a eu la bonne idée de leur procurer généreusement des emplois dans les mines de charbon.

La plus grande partie des Juifs du Yichouv parviendront-ils à quitter la Terre promise avant la date fatidique du 14 mai 1948 ? Quel sera le sort des Juifs demeurés en terre arabe ? Staline respectera-t-il l’accord prévoyant le départ de l’Armée rouge ?

Vous le saurez en lisant le troisième épisode de notre feuilleton !

Guy Konopnicki

Guy Konopnicki est journaliste et écrivain. Parmi ses nombreux livres, il est notamment l’auteur, avec Brice Couturier, de ‘Réflexions sur la question goy’ (Éd. Lieu Commun, 1988) et de ‘La faute des Juifs – Réponse à ceux qui nous écrivent tant’ (Balland, 2002).

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