# 242 / Edito

Après une campagne riche en polémiques, Zohran Mamdani vient d’être élu maire de New York. Cette élection acte le succès d’une nouvelle génération de militants au sein du parti démocrate, s’appuyant sur de fortes revendications économiques et sociales et cherchant à organiser une opposition frontale à l’administration Trump. Mais elle traduit aussi une évolution des Démocrates dans leur rapport à Israël – Mamdani ayant toujours assumé une position résolument antisioniste – et inscrit cette question comme centrale pour le débat politique américain. Donald Trump ne s’y est d’ailleurs pas trompé, puisque, avec sa finesse habituelle, sa réaction a d’abord été de traiter de « stupides » les juifs new-yorkais ayant voté Mamdani. Sébastien Lévi interroge cette semaine les questions soulevées par cette élection au sein de la plus grande ville juive américaine, leur vote et les clivages générationnels qu’il révèle. Comment se positionnent les juifs américains par rapport à cette évolution du parti démocrate qui a longtemps été leur maison politique, mais dont les évolutions actuelles ne lassent pas d’inquiéter ?

Après que Denis Charbit ait rappelé la semaine dernière le contexte de l’assassinat de Rabin et interrogé son impossible commémoration, Ilan Greilsammer analyse la question de son legs politique. Trente ans après l’assassinat de Rabin, que reste-t-il du camp de la paix ? Quel constat dresser au sujet des objectifs poursuivis par Rabbin, alors que le camp de la droite spartiate semble devenu majoritaire et a enlisé la perspective d’une pacification des rapports israélo-palestiniens ? Et comment la guerre à Gaza intervient-elle dans ce diagnostic ? À toutes ces questions, Greilsammer adresse une réponse éclairée, bien qu’inquiète, et tournant son regard vers les décisives élections de 2026.

En écho contrasté au texte de Sébastien Lévi, nous republions l’analyse de Jean-Claude Milner datant de mars dernier sur les évolutions du rapport entre les États-Unis et Israël. Il y annonçait la mise sous tutelle américaine d’Israël, et un devenir-WASP du judaïsme américain. À l’aune du constat, rappelé par Lévy, d’une prise de distance des juifs américains vis-à-vis du sionisme, la lucidité du diagnostic semble s’imposer.

L’élection de Zohran Mamdani à la mairie de New York, qui en fait le premier maire ouvertement antisioniste de la métropole, dépasse de loin les frontières de la politique municipale. Ce succès, porté par une jeunesse progressiste et une partie significative des Juifs américains, révèle la profondeur des fractures générationnelles et idéologiques au sein du judaïsme américain. Entre désaffection croissante envers Israël, montée de l’antisémitisme et recomposition du Parti démocrate, la victoire de Mamdani agit comme un révélateur brutal d’un monde juif américain en plein trouble identitaire.

Trente après l’assassinat de Rabin, que reste-il du camp de la paix ? Ilan Greilsammer rappelle ici quels étaient les objectifs poursuivis par la politique de Rabin, et dresse le constat amer d’un devenir majoritaire du camp de la droite. L’incurie de ce dernier, révélée par le 7 octobre et la conduite de la guerre à Gaza, permettra-t-elle de rebattre les cartes ?

En mars dernier, Jean-Claude Milner livrait dans nos colonnes un diagnostic dérangeant : la rapide mise sous tutelle américaine d’Israël, en raison de la fin de l’illusion qui faisait de l’État juif un « diamant impénétrable et solitaire », un représentant de l’Occident démocratique en terres hostiles. « Occidental », dans son texte, signifiait avant tout la reconnaissance de la suprématie américaine, des valeurs WASP et d’une doctrine où la paix est la règle et la guerre l’exception. Une alternative se dessinait alors pour les juifs : ou l’orientalisation dans un Israël vassalisé, ou la dissolution dans la nouvelle Jérusalem américaine. À l’heure où la présidence Trump semble rebattre les cartes en renouant avec une logique impériale, et où l’Europe semble toujours plus marginalisée, Milner revient sur son diagnostic.

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Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.

La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.