La trêve conclue entre Israël et le Hamas, et dont les récents développements font craindre qu’elle ne s’avère brève, donne lieu à un spectacle déplorable. De part et d’autre, la sinistre réalité de la situation est occultée par des proclamations fanfaronnantes. Côté Hamas, on crie « victoire » sur un champ de ruines et de cadavres, au mépris du sort de la population gazaouie pour laquelle le groupe n’a d’autre projet que celui du martyr. Côté israélien, alors même que la société s’émeut devant la parade d’otages émaciés organisée par le Hamas, Netanyahu et ses alliés se réjouissent des parodies de « solution » annoncées avec une légèreté inouïe par le président Trump. C’est que, pour un sionisme dévoyé, tout escamotage de la question palestinienne est déjà une victoire en soi. Là réside l’intelligence secrète qui unit les projets pourtant contrastés pour l’avenir de Gaza : que les terroristes creusent à nouveau leurs tunnels sous les pieds de civils démunis, ou que Gaza devienne un paradis ultralibéral pour touristes après un déplacement forcé de sa population, c’est le caractère politique de la situation qui aura été oblitéré. Car, des deux côtés, on cherche à faire prévaloir le simple rapport de force entre des puissances se mesurant à leur capacité de destruction. Face à cette dépolitisation brutale des enjeux, et à leur déréalisation, nous souhaitions faire entendre une autre description de la situation, qui ne peut être décrite comme une victoire pour personne. K. se fait donc le relais d’une voix palestinienne, celle de Ihab Hassan, qui pense dans les seuls termes praticables politiquement : ceux d’un conflit entre deux revendications nationales également justes, désignant l’horizon d’une solution à deux États

 

>>> Suite de l’édito

 

La trêve conclue entre Israël et le Hamas donne lieu à un spectacle déplorable. Côté Hamas, on crie "victoire" sur un champ de ruines et de cadavres, au mépris du sort de la population gazaouie pour laquelle le groupe n’a d’autre projet que celui du martyr. Côté israélien, Netanyahu se réjouit des parodies de « solution » annoncées avec une légèreté inouïe par le président Trump. K. se fait le relais d’une voix palestinienne, celle de Ihab Hassan, d’abord parue dans Liberties, qui pense dans les seuls termes praticables politiquement : ceux d’un conflit entre deux revendications nationales également justes, désignant l’horizon d’une solution à deux États.

Dans ce nouvel épisode des podcasts de la Revue K., Elie Petit reçoit Nathalie Azoulai pour une discussion autour de deux de ses romans, séparés de 20 ans : Les Manifestations (2005, Seuil) et Toutes les vies de Théo (qui vient de sortir aux éditions P.O.L.).

La pensée de Levinas procède avant tout d’un souci éthique, qui semble l’élancer vers des hauteurs étrangères à la mêlée politique. Pour autant, on trouve en certains points clés de son œuvre des considérations politiques audacieuses et en mesure d’éclairer notre action sur le présent. Jean-François Rey nous fait ici découvrir ce versant trop souvent survolé du philosophe. 

Le travail de documentariste de Ruth Beckermann (née en 1952) – qui n’est encore pas assez connue en France – a joué un rôle important dans l’évolution du rapport de l’Autriche à son passé. Dans cette rencontre avec la cinéaste et écrivaine viennoise, Liam Hoare l’interroge sur quelques-uns des documentaires de sa riche filmographie et sur la manière dont ils articulent militantisme politique et judaïsme, dans le contexte d’une montée graduelle de l’extrême-droite et d’un tabou portant sur le sort des juifs pendant la guerre.

Au nom de quelle promesse, et de quelle loi, la conquête de la terre promise est-elle justifiée ? Ivan Segré propose ici une lecture du livre des Juges, dont la structure révèle selon lui la nécessité d’une mise à mort de la pulsion belliciste et phallique qui, hier comme aujourd’hui, aliène Israël de son fondement.

A l’occasion de la commémoration des 80 ans de la découverte du camp d’Auschwitz-Birkenau par l’armée rouge, nous publions un dossier rassemblant des textes parus dans K. traitant de l’histoire et des enjeux mémoriels entourant ce lieu qui symbolise, plus que tout autre, l’horreur de la Shoah. Vous pourrez y retrouver une réflexion de Bruno Quélennec sur l’antisémitisme « à cause d’Auschwitz », un manuscrit clandestin écrit par des prisonniers juifs du camp qui déjà s’inquiétaient de la manière dont serait déformée la représentation de la Shoah, et plusieurs textes s’affrontant justement à ces déformations et aux difficultés dans la constitution d’une mémoire du génocide.

Pourquoi certains historiens spécialistes de l’antisémitisme refusent-ils absolument toute analogie entre le 7 octobre et les persécutions antijuives historiques ? Matthew Bolton situe ici ce débat aux lourdes implications politiques sur un plan épistémologique, rendant compte des motifs pour lesquels les « historicistes » refusent de concevoir l’antisémitisme comme une « haine éternelle ». Mais il dégage en retour l’impensé de leur méthode, qui finit par dissoudre le concept même d’antisémitisme en faisant oublier sa nécessité historique.

Alors que sont commémorés les 80 ans de la découverte d’Auschwitz, et que les derniers survivants sont convoqués pour pallier aux insuffisances d’une mémoire qui semble ne jamais parvenir à s’inscrire, Ruben Honigmann réfléchit dans ce texte à la possibilité de raconter la Shoah. Dans ce texte personnel, cette tentative s’apparente à un arpentage sans fin et dont le sens n’est jamais assuré.

Alors que les bombardements s’arrêtent à Gaza et que les otages israéliens commencent à être libérés, Bruno Karsenti et Danny Trom interrogent les implications de cet accord de cessez-le-feu qui, s’il rend Israël au sens de sa mission historique, laisse latente la menace du Hamas et met en cause la forme prise par les opérations militaires menées depuis plus d’un an.

L’Europe du XXe siècle connaît des lieux dont le nom est indissociable des atrocités qui y ont été commises. Auschwitz, Majdanek, Buchenwald, Dachau, Bergen-Belsen… Tous n’ont cependant pas une sonorité allemande ou polonaise. La trajectoire familiale, faite de survie et d’exil, que Marta Caraion retrace dans Géographie des ténèbres. Bucarest-Transnistrie-Odessa, 1941-1981, dessine une autre toponymie de l’effroi. Transformée par la Roumanie du maréchal Antonescu en laboratoire d’épuration ethnique, la Transnistrie en est le nœud le plus sombre. Un nœud que ce récit intime et brillamment documenté parvient à défaire, fil par fil, mettant à nu la mémoire longtemps occultée de la Shoah roumaine.

Les images des crimes du 7 octobre ont suscité, au-delà d’un choc bien compréhensible, de nombreux débats : fallait-il montrer l’horreur que les terroristes du Hamas ont cherché à filmer et à diffuser ? Emmanuel Taïeb interroge ici le destin de ces images et les usages politiques qui en ont été fait, mettant en évidence leur réversibilité et le risque qu’il y aurait à les invisibiliser.

Alors que l’Allemagne bataille toujours avec les spectres de son passé, sa réponse à la montée contemporaine de l’antisémitisme vient interroger la complexité de cohésion nationale. Les mesures récemment prises pour combattre ce fléau à tous les niveaux de la société illustrent la manière dont, à une authentique préoccupation pour la vie juive, peuvent venir se mêler des manœuvres politiques. La seconde partie de l’enquête menée par Monty Ott interroge les enjeux éthiques et sociétaux de la lutte allemande contre l’antisémitisme.

Avec le soutien de :

Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.

La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.