Roumanie

On entend parfois dire que les juifs seraient réfractaires à la révélation christique. Pour Pâques, K. publie une nouvelle d’Ion Luca Caragiale, traduite du roumain par Elena Guritanu, qui montre qu’il n’en est rien. Dans ce récit d’une étrange conversion, le juif accepte en effet de se saisir de la main catholique qui lui est tendue, seulement un peu aidé dans sa décision par cette fièvre sans laquelle il n’est pas de foi véritable.

L’Europe du XXe siècle connaît des lieux dont le nom est indissociable des atrocités qui y ont été commises. Auschwitz, Majdanek, Buchenwald, Dachau, Bergen-Belsen… Tous n’ont cependant pas une sonorité allemande ou polonaise. La trajectoire familiale, faite de survie et d’exil, que Marta Caraion retrace dans Géographie des ténèbres. Bucarest-Transnistrie-Odessa, 1941-1981, dessine une autre toponymie de l’effroi. Transformée par la Roumanie du maréchal Antonescu en laboratoire d’épuration ethnique, la Transnistrie en est le nœud le plus sombre. Un nœud que ce récit intime et brillamment documenté parvient à défaire, fil par fil, mettant à nu la mémoire longtemps occultée de la Shoah roumaine.

Dans la Roumanie communiste des Juifs ont été troqués contre des porcs, des veaux ou des vaches. C’est ainsi que les grands-parents de Sonia Devillers – comme elle le raconte dans Les Exportés (Flammarion, septembre 2022) – ont pu passer à l’ouest. Se dégage de la Roumanie un tableau aux couleurs de sang et de tripes : après avoir été abattus artisanalement, les juifs rescapés valaient tout juste le prix des bêtes contre lesquelles ils étaient échangés.

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Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.

La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.