# 75 / Edito

 

Emmanuel Macron entamera ce jeudi 25 août une visite officielle de trois jours en Algérie. Haïm Korsia, le grand rabbin de France fait partie du voyage, se rendant pour la première dans le pays d’où ses parents sont originaires. « Je pourrai enfin voir une terre sur laquelle j’ai toujours beaucoup lu dans des livres et des articles. Certains des livres que j’ai vus étaient décorés de belles images colorées, et d’autres racontaient des tragédies. J’ai l’impression de connaître ce pays même si je n’y suis jamais allé. J’ai hâte de le découvrir. » Insultes sur les réseaux sociaux et polémiques dans l’opinion algérienne. Le chef du Mouvement de la société pour la paix (tendance Frères musulmans), Abderrazak Makri, a dénoncé la présence du grand rabbin de France, dans la délégation officielle française. Au milieu des années 1990, le nombre des Juifs ne dépassait pas la cinquantaine en Algérie, alors que 150.000 y vivaient avant l’indépendance. La composante juive d’origine algérienne lors de la visite diplomatique serait de trop ? Cette actualité nous donne l’occasion de republier l’article de Joseph Benamour  – « Reste-t-il encore des Juifs en Algérie ? » – qui revient sur la légende, abondamment présente dans les discours et la presse d’Algérie, selon laquelle il y resterait des Juifs. Mais on ne les trouve jamais… « Des juifs, en Algérie ? Il y en a encore. Ils sont nombreux, un peu partout. Ils se cachent. Pratiquent leur religion en silence. Sans se montrer. Des juifs en Algérie ? Bien sûr, ma grand-mère en connait… » Joseph Benamour évoque cette étrange distorsion qui fait des Juifs en Algérie une présence fantôme et fantasmée.

À côté de cette reprise, K. publie le troisième épisode de la fiction de Grigory Kanovich. On y verra comment le rabbin Hillel et le pharmacien Zalman Amsterdamskii fomentent une idée de génie pour aider le Pauvre Rothschild à retrouver ses riches parents, avant que l’invasion russe de leur ‘petit lieu’ ne gâche leur projet…

Deuxième reprise de la semaine en attendant la rentrée, un entretien avec le romancier Yishaï Sarid, auteur du Monstre de la mémoire (Actes Sud), livre provocateur et dérangeant qui questionne sans concession la relation des Israéliens à la mémoire de la Shoah et à l’Europe.

Soixante ans après l’indépendance de l’Algérie, et le départ des 150 000 juifs qui y vivaient, la question d’une présence juive en Algérie continue de déchaîner les passions. Dans les médias, chez les politiques, sur les réseaux sociaux, au café, le mythe circule : il resterait encore des juifs en Algérie. Qu’en est-il réellement ? L’auteur se pose la question, mais la réponse existe-t-elle vraiment ?

« L’été n’augurait vraiment rien qui vaille. Une armée étrangère s’était établie en Lituanie, dont les unités s’installèrent dans les accueillants bois et bosquets qui ceinturaient le petit lieu. Le président lituanien – auprès duquel le fameux invité, le baron de Rothschild, s’apprêtait soi-disant à racheter le petit lieu avec tous les Juifs qui y habitaient –, avait apparemment décidé de ne pas attendre l’offre avantageuse du banquier et s’était enfui à l’étranger en abandonnant tous ses biens. »

Paru il y a un an, Le Monstre de la mémoire (Actes Sud) est le quatrième livre de Yishaï Sarid, après deux romans policier et un roman d’anticipation dystopique. Dans ce dernier, Le troisième temple, il imaginait Tel-Aviv et Haïfa détruites, le projet de reconstruction du temple de Jérusalem et Israël devenir un royaume théocratique. Le Monstre de la mémoire est un récit tout aussi provocateur et dérangeant qui questionne la relation des Israéliens à la mémoire de la Shoah et à l’Europe.

Avec le soutien de :

Merci au bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll pour leur coopération dans la conception du site de la revue.

Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.