Politique - Antisémitisme

Après avoir exploré la manière dont l’Autriche entendait assumer la responsabilité de son passé nazi et promouvoir la vie juive, Liam Hoare décrit les défis et paradoxes de cette entreprise. Comme la plupart des pays occidentaux, on a assisté en Autriche ces dernières années à un regain de l’antisémitisme, alors qu’elle est de plus dirigée par un parti associé à l’extrême-droite. Comment dans ces conditions, et alors que la guerre à Gaza enflamme les esprits en Europe, assurer à long terme la stabilité de la vie juive autrichienne ?

Pour ce nouveau volet de notre série, conçue en partenariat avec la DILCRAH, sur l’antisémitisme en Europe, Liam Hoare s’est intéressé à la stratégie autrichienne de lutte contre la haine et les préjugés envers les juifs. Dans cette première partie de son enquête, qui sera complétée la semaine prochaine, il s’arrête sur la volonté de pérenniser la vie juive autrichienne, notamment par une politique éducative. Mais comment cela s’articule-t-il avec le passé autrichien de collaboration dans les crimes nazis ?

Ce texte a été rédigé dans un autre contexte que celui qui s’est formé après le 7 octobre. Il anticipait toutefois une double question que cet événement a précipitée : celle de la spécificité de l’antisémitisme à l’intérieur de la logique raciste, et celle de ce qui, dans les sociétés contemporaines, rend les victimes potentielles du racisme parfois porteuses, paradoxalement, d’arguments antisémites.

Philip Spencer, auteur de nombreux textes sur l’antisémitisme moderne et la Shoah – et plus particulièrement sur les problématiques soulevées par leur traitement à gauche –participe aujourd’hui au nouveau London Centre for the Study of Contemporary Antisemitism, fondé par David Hirsh. Dans l’entretien qu’il accorde à la Revue K., où il évoque son propre itinéraire politique, il revient sur les réactions au 7 octobre en Angleterre, repassant par l’histoire de l’héritage non digéré du mandat anglais sur la Palestine comme par celle du Labour sous la direction de Jeremy Corbyn.

Le discours prononcé le 2 novembre à propos de la situation au Proche-Orient par le Vice-chancelier allemand Robert Habeck, membre des Verts, a frappé les esprits. D’une clarté sans faille, qui sans doute en Europe ne pouvait venir que d’Allemagne, il y insiste à la fois sur le droit des Palestiniens à avoir leur propre État et celui d’Israël à défendre sa sécurité. Fustigeant l’ambiguïté d’une partie de l’opinion envers le Hamas, il explique pourquoi l’Allemagne et l’Europe, si elles veulent rester fidèles à ce qui fonde leur légitimité politique, ne doivent céder en aucune circonstance et pour aucune raison « humanitaire » sur le combat contre l’antisémitisme.

À trente ans, Cléo Cohen est représentative d’un mouvement qui traverse une partie de la jeune génération sépharade : le désir de renouer, par-delà les silences et parfois les réticences de leurs parents et de leurs grands-parents, avec leur histoire arabe. Partie vivre en Tunisie – où elle a eu « l’impression de [se] sentir chez [elle] » – elle était dans la synagogue de la Ghriba quand a eu lieu l’attentat. Dans ce texte, elle témoigne de son angoisse pendant l’attaque, et surtout de la façon dont l’évènement est venu percuter son parcours. Elle dit l’antisémitisme terroriste, l’antisémitisme latent de la société tunisienne, l’antisémitisme qui interdit de reconnaître les juifs comme des victimes, et le grand silence, en Tunisie comme en France, au milieu duquel cet antisémitisme se déploie.

Martine Cohen est sociologue, spécialiste des évolutions du judaïsme français. Elle revient sur les sources de malaise qui fragilisent le « franco-judaïsme ». Ce malaise s’est cristallisé au cours des années 1980 en rupture avec l’israélitisme du XIXe siècle. La critique croissante d’Israël dans l’opinion publique, et une laïcité d’ouverture contrecarrée depuis les années 2000, constituent les autres facteurs d’une fragilisation. Dans la suite de l’ouvrage, l’auteure analyse également les évolutions qui montreraient au contraire une possible recomposition d’un franco-judaïsme rénové.

L’antisémitisme connait depuis quelques années une escalade vertigineuse aux États-Unis. Dans ce contexte, la principale idée reçue des Juifs américains – à savoir que la violence antisémite ne se produit que « là-bas », en Europe et au Moyen-Orient – a été mise à rude épreuve. Daniel Solomon revient sur ce phénomène, et insiste sur ce que lui apporte de nouveau la figure de Kanye West, en qui se croisent de manière inédite des tropes antisémites venant de la droite et d’autres venant de la gauche.

Jonas Pardo milite depuis plusieurs années à l’extrême-gauche, où il a longtemps caché son judaïsme. À la suite de l’attentat de l’Hyper Cacher, il décide, avec une poignée d’autres militants, de ne plus laisser passer l’antisémitisme qui s’y manifeste parfois et le déni qui l’entoure souvent. C’est la première étape d’un parcours qui le conduira à créer une formation à la lutte contre l’antisémitisme pensée spécifiquement pour s’adresser à la gauche. Dans cet article pour K. il raconte son parcours, détaille son atelier de formation et les diverses réactions qu’il suscite.

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Merci au mahJ de nous permettre d’utiliser sa photothèque, avec le voyage visuel dans l’histoire du judaïsme qu’elle rend possible.

La revue a reçu le soutien de la bourse d’émergence du ministère de la culture.